Les débats houleux et les manifestations retentissantes qui ont accompagné l’adoption de la Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe du 23 avril 2013, ont démontré récemment que la lutte contre les discriminations reste d’actualité.
A ceux qui pensaient encore que l’homophobie était d’un autre temps, la démonstration est faite la tolérance n’est pas un acquis.
Cette question ne touche pas que la conception de la famille, mais également d’autres domaines où l’esprit de cohésion et les valeurs humaines prévalent.
C’est ainsi que la Cour de Justice de l’Union Européenne a rendu le 25 avril dernier un arrêt intéressant à plus d’un titre.
Les juges communautaires se sont, en effet, prononcés sur les pratiques discriminantes d’un club de football professionnel.
– La saisine de la CJUE :
La saisine ressortait d’une question préjudicielle posée par une juridiction roumaine suite à un litige entre l’association ACCEPT et le Conseil National (Roumain) de lutte contre les discrimination.
Le contexte était le suivant :
Une personne se présentant comme le dirigeant d’un club de football professionnel avait indiqué publiquement qu’un footballeur professionnel était exclu du processus de recrutement car il était présenté comme homosexuel.
Le 3 mars 2010, ACCEPT, organisation non gouvernementale roumaine dont l’objet est de promouvoir et de protéger les droits des personnes lesbiennes, gay, bisexuelles et transsexuelles, a déposé plainte contre le club de football devant le Conseil National de lutte contre les discriminations.
Contre toutes attentes, le Conseil avait rejeté la plainte, décision à laquelle l’association ACCEPT avait répondu en saisissant la juridiction judiciaire roumaine.
La Cour d’Appel de BUCAREST s’est alors interrogé sur l’application du droit européen et notamment de la directive 200/78 dont l’objectif est « d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, [le] handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en oeuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement ».
Mais le recrutement sportif et les conditions d’accès à l’emploi rentrent-ils également dans le cadre de la Directive ?
– La décision de la CJUE :
C’est cette question que La CJUE a tranché en rappelant préalablement dans son arrêt qu’il ne lui appartenait pas d’examiner les faits, ni de dire si les circonstances à l’origine du litige au principal étaient révélatrices d’une discrimination fondée sur l’orientation sexuelle.
Seule l’instance juridictionnelle nationale conformément au droit national ou aux pratiques nationales détient ce pouvoir d’appréciation.
CJUE arrêt du 19 avril 2012, Meister, C 415/10
En revanche, le fait que le Club de Football n’est pas contredit ou « pris ses distances» avec les déclarations en cause constitue un élément dont la Cour tient compte dans le cadre d’une appréciation globale des faits.
C’est ainsi que les juges de l’Union ont souligné qu’un « employeur défendeur ne saurait réfuter l’existence de faits permettant de présumer qu’il mène une politique d’embauche discriminatoire en se limitant à soutenir que les déclarations suggestives de l’existence d’une politique d’embauche homophone émanent d’une personne qui, bien qu’elle affirme et semble jouer un rôle important dans la gestion de cet employeur, n’est pas juridiquement capable de le lier en matière d’embauche ».
Cette position contribuera à la régression des stigmatisations pour des discriminations d’origine sexuelle au sein du sport et permettra plus de diversité.
Mais seule la juridiction Roumaine devra se prononcer sur le fond du dossier et vérifier si la sanction infligée (avertissement) au Club est appropriée à cette discrimination.
– La résonance avec la Cour de Cassation :
On ne peut que se réjouir de cette décision qui trouve échos à celle de la Cour de Cassation en date du 24 avril 2013.
Cass. Soc. 24 avril 2013 Pourvoi n°11-15204
Les juges français ont eu à s’interroger sur un litige concernant un salarié ayant réussi les épreuves d’aptitude aux fonctions de sous-directeur.
Ayant postulé quatorze fois à un poste de sous-directeur ou d’un niveau équivalent sans succès, il a fini par être licencié pour faute grave.
Malgré la transaction conclue avec son employeur, le salarié a saisi la juridiction prud’homale aux fins de solliciter la reconnaissance de son préjudice résultant d’une discrimination compte tenu de son orientation sexuelle
La discrimination et son indemnisation n’étant pas l’objet de la transaction, celle-ci ne faisait pas échec à la reconnaissance de la discrimination par les juges.
L’employeur opposait au salarié son licenciement et l’absence d’affectation à un poste de sous-directeur suite au refus de mobilité du salarié, raisons objectives et pertinentes selon lui.
La Cour de cassation a retenu, cependant, l’ambiance homophobe présente au sein de l’entreprise pour faire droit aux prétentions du salarié.
En dépit du climat national, le printemps 2013 apparaît enfin propice à plus de tolérance et à moins de discrimination.
Le sport le revendique, à l’image du club de footbaal Stonevall Londonien crée en 1991 affichant son statut de « gay friendly ».
Récemment, le monde du basket a également été éclairé d’une lumière nouvelle par la déclaration de Jasons COLLINS, joueur NBA qui a annoncé publiquement le 29 avril 2013 :
» I’m a 34-year-old NBA center. I’m black. And I’m gay »