Contrat d’assurance vie : la fin de la doctrine Bacquet

Le cabinet Myriam DELONCA a recueilli l’avis d’un juriste rompu aux problématiques patrimoniales sur ce sujet épineux et complexe. Monsieur Arnaud LUONG apporte ses lumières.

Le contrat d’assurance-vie est défini comme le contrat par lequel une personne (l’assureur) s’engage, en contrepartie du paiement d’une rémunération (prime ou cotisation), à verser un capital ou une rente, soit à la personne qui a souscrit la police (le souscripteur), soit à la personne sur la tête de laquelle le risque est pris (l’assuré, qui est généralement le souscripteur), soit à un tiers désigné par le souscripteur/assuré (le bénéficiaire), dans le cas où un événement futur déterminé (le risque assuré, c’est-à-dire la survie ou le décès de l’assuré) se réalise.

Ainsi, le contrat d’assurance en cas de vie prévoit le versement d’un capital ou d’une rente dans l’hypothèse où l’assuré serait vivant à l’expiration du contrat.

Lorsque le contrat n’est pas dénoué au décès de l’un des époux , mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, se pose alors le problème du traitement fiscal de la valeur de rachat du contrat d’assurance-vie.

Avant le 1er janvier 2016. Au niveau des droits de succession, l’administration fiscale a longtemps offert la possibilité aux héritiers de traiter la valeur de rachat du contrat comme un bien propre du survivant . Puis, avec l’adoption de la loi Tépa du 21 août 2007, qui a exonéré le conjoint survivant de droits de succession, la réponse ministérielle Bataille a été rapportée puisque devenue sans objet.

Par ailleurs, depuis la réponse ministérielle Bacquet du 29 juin 2010 , l’administration considère que la valeur de rachat des contrats d’assurance-vie souscrits avec des fonds commun fait partie de l’actif de communauté soumis aux droits de succession dans les conditions de droit commun.

Par conséquent, même si le conjoint survivant est exonéré de droits de succession, ce n’est pas le cas des héritiers. En effet, l’intégration de la valeur de rachat dans l’actif commun entraine aussi la taxation aux droits de succession de la moitié de cette valeur de rachat aux droits de succession pour les héritiers, autres que le conjoint. En définitive, la réponse Bacquet avait pour mérite d’aligner les règles du droit fiscal sur les règles de droit civil.

Depuis le 1er janvier 2016.

Suite à un communiqué de presse, publié le 12 janvier 2016 sur le site economie.gouv.fr, le ministre des Finances Michel Sapin, annonçait sa volonté de rapporter la réponse ministérielle dite Bacquet (RM Bacquet, AN du 29/06/2010, n° 26231, page 7283). Le tout était de savoir à partir de quand la réponse Bacquet allait être rapportée, et si, comme certains auteurs le soulignaient, cette suppression allait aboutir à un différé d’imposition.

Puis, un mois et demi plus tard, l’administration donnait enfin sa position sur la suppression de la réponse Bacquet (RM à Jean David CIOT, AN du 23/02/2016 page 1648 n° 78192).

Elle précise en effet, «concernant les successions ouvertes à compter du 1er janvier 2016, que la valeur de rachat d’un contrat d’assurance-vie, souscrit avec des fonds communs et non dénoué à la date du décès de l’époux bénéficiaire de ce contrat, n’est plus intégrée à l’actif de la communauté conjugale lors de sa liquidation, et ne constitue donc pas un élément de l’actif successoral pour le calcul des droits de mutation dus par les héritiers de l’époux prédécédé.

En revanche, lors du dénouement du contrat suite au décès du second conjoint, les sommes versées aux bénéficiaires de l’assurance-vie resteront soumises aux prélèvements prévus, suivant les cas, aux articles 757 B et 990 I du CGI dans les conditions de droit commun».

Par conséquent, la réponse ministérielle Bacquet est rapportée pour les successions ouvertes à compter du 1er janvier 2016, c’est-à-dire pour les décès intervenus à compter du 1er janvier 2016.

Il y a ainsi une distorsion complète entre l’application des règles de droit civil et les règles fiscales, la valeur de rachat du contrat d’assurance-vie se trouvant exclue de l’assiette des droits de mutation par décès.

Pour mieux comprendre étudions des cas pratiques.

CAS PRATIQUES